Des puces genevoises dans des missiles russes tirés sur l’Ukraine

Des chercheurs britanniques ont découvert des composants électroniques suisses, et plus précisément une puce produite par une entreprise genevoise, dans les missiles high-tech Kh-101 de Poutine, avec lesquels la Russie bombarde depuis des mois des civils tout comme les infrastructures stratégiques en Ukraine. Selon le SonntagsBlick, une équipe de chercheurs du Royal United Services Institute (Rusi) a examiné les restes des missiles tirés en Ukraine et a trouvé des microprocesseurs de STMicroelectronics. Ce groupe, qui possède des sites de production en Italie, en France et à Singapour, a son siège à Plan-les-Ouates (GE).
Les projectiles concernés mesurent près de sept mètres de long et transportent une demi-tonne d’explosifs, avec une portée de 2800 kilomètres. Ces missiles volent particulièrement bas, ce qui les rend difficilement détectables pour les systèmes radars et en font l’une des armes russes les plus destructrices.

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Biens interdits à la livraison

Contactée par le SonntagsBlick, l’entreprise genevoise n’a pas souhaité s’exprimer. En revanche, le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco) s’est montré plus loquace par la voix de sa porte-parole Antje Baertschi. Cette dernière a reconnu que le Seco avait connaissance de cette information. Et si le secrétariat ne veut pas donner de détails sur les fabricants concernés, sa porte-parole souligne que les investigations menées jusqu’à présent ont montré que les composants étaient des produits industriels de masse qui n’étaient pas soumis à des restrictions commerciales jusqu’au début de la guerre fin février.

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La situation a changé le 4 mars, lorsque Berne a interdit la vente de nombreux composants électroniques en Russie. Les mesures ont été renforcées à plusieurs reprises. Et Antje Baertschi de déclarer que «les biens seraient désormais interdits à la livraison et à la vente (…) en raison des sanctions».

Néanmoins, comme les puces électroniques de STMicroelectronics sont probablement fabriquées sur des sites de production à l’étranger, elles sont soumises aux règles d’exportation des pays concernés.

Suisse fortement impliquée

Les puces ne sont pas les seuls composants suisses dans la machine de guerre de Poutine. En effet, selon les chercheurs de Rusi, la Suisse est le quatrième fabricant le plus important de composants trouvés dans les systèmes d’armes russes. Outre STMicroelectronics, les Britanniques mentionnent le groupe U-blox de Thalwil (ZH), une ancienne spin-off de l’EPFZ.

Vladimir Poutine a plus que jamais besoin des composants électroniques occidentaux pour fabriquer de nouveaux drones et missiles. Mais les interdictions de livraison lui rendent la tâche difficile. Le journal américain Politico a récemment rendu publique une liste confidentielle émanant de Moscou, sur laquelle figurent les composants dont le besoin est urgent. Ce sont avant tout des semi-conducteurs, des transformateurs, des connecteurs et des transistors. Comme le Kremlin s’est appuyé ces dernières années sur des fournisseurs occidentaux, la Russie ne serait pas en mesure de fabriquer elle-même ces pièces.
Des produits suisses figurent également sur la liste. Ainsi la Russie rechercherait notamment les connecteurs de l’entreprise schaffhousoise TE Connectivity.

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Sanctions potentiellement contournées

Le secrétaire américain à la défense Lloyd Austin s’est montré optimiste après les attaques du 23 novembre, affirmant que la Russie «ne serait pas en mesure de produire rapidement des munitions de précision en raison des restrictions commerciales».

Une affirmation que remet en doute un rapport du groupe de recherche anglais Conflict Armament Research (CAR) daté du 5 décembre. Selon eux, l’analyse des débris de missiles russes Kh-101 tirés sur l’Ukraine il y a un mois démontre qu’ils ont été fabriqués entre juin et septembre 2022, et entre octobre et novembre 2022. Difficile toutefois de déterminer si la Russie avait encore en stock les composants occidentaux ou si ceux-ci ont été fournis au Kremlin malgré les sanctions.

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